- 6 Mai 2020 - Planétarium : Actualités astronomiques
Il y a un siècle, un débat a été organisé pour tenter de percer le mystère de l’une des énigmes de l’astronomie de l’époque : quelle est la nature des nébuleuses spirales ?
Longtemps, les astronomes se sont questionnés sur la nature de ces nébuleuses spirales floues qu’ils entrevoyaient avec les grands télescopes. S’agissait-il d’objets faisant partie de notre galaxie la Voie lactée, ou étaient-elles de lointaines galaxies ?
À cette époque, mesurer la distance de ces objets flous était difficile. Malgré cela, les astronomes croient que ces objets sont probablement situés aux confins de la Voie lactée.
En 1920, l’astronome américain autodidacte George Ellery Hale convainc la National Academy of Sciences de Washington d’organiser un débat pour tenter de trancher la question sur la nature des nébuleuses spirales.
Pour le débat, il recrute deux protagonistes : son jeune collègue de l’observatoire du mont Wilson, Harlow Shapley et l’éminent Heber Curtis de l’observatoire Lick.
Shapley défend la thèse selon laquelle les nébuleuses spirales sont des objets de la Voie lactée. Pour lui, notre galaxie aurait une taille de 300 000 années-lumière et le Soleil serait situé en bordure.
De son côté, Curtis avance que les nébuleuses spirales sont des «univers îles» situées bien au-delà de la Voie lactée. Curtis croit que la Voie lactée n’a que 30 000 années-lumière de diamètre et le Soleil est situé près du centre.
La grande discussion
Après de nombreuses négociations, le débat se transforme en discussion ayant pour titre «L’échelle de l’Univers». Les deux protagonistes feront une présentation de 40 minutes devant les membres de la National Academy of Sciences de Washington et leurs arguments seront publiés dans les annales de l’institution.
Le grand soir a lieu le 26 avril 1920. Shapley est nerveux, car il n’est pas à l’aise dans ce genre de présentation en public. Il fait une lecture monocorde d’un texte de 19 pages très général et didactique (il consacre 6 pages à définir ce qu’est une année-lumière).
Curtis, au contraire, est un orateur volubile et expérimenté. Il fait une présentation technique appuyée par l’utilisation de diapositives.
Le débat se solde par un match nul, car personne n’arrive véritablement à imposer son idée.
Hubble tranche le débat
C’est finalement Edwin Hubble, surnommé le titan de l’astronomie en Amérique, qui va trancher le débat en 1923. Hubble travaille alors au mont Wilson sur ces fameuses nébuleuses spirales. Il découvre dans celle d’Andromède des étoiles variables de type céphéide.
La luminosité de ces étoiles varie de façon périodique. Quelques années plus tôt, Henrietta Leavitt a montré que la période de variation de ces étoiles est proportionnelle à leur luminosité intrinsèque. En mesurant la période de variation et la brillance apparente d’une céphéide, nous pouvons calculer sa distance.
Par cette méthode, Hubble va montrer que la distance d’Andromède est de 900 000 années-lumière, soit bien au-delà des limites de la Voie lactée. Les nébuleuses spirales sont bien des «univers-îles». Noter ici que les calculs de Hubble seront raffinés au fil du temps. Aujourd’hui, la distance estimée de la galaxie d’Andromède est de 2 millions années-lumière.
Finalement, les deux protagonistes du débat avaient en partie raison. Les nébuleuses spirales sont bien des objets à l’extérieur de la Voie lactée, comme l’a soutenu Curtis. Mais son modèle de notre galaxie s’est avéré incorrect.
Aujourd’hui, les dimensions de la Voie lactée sont estimées à 100 000 années-lumière et notre Soleil est situé en bordure de celle-ci. Il s’agit du modèle avancé par Shapley lors du débat. Il avait cependant surestimé les dimensions de la Voie lactée.