- 12 Avril 2023 - Planétarium : Expérience
Les travaux des femmes scientifiques sont souvent trop peu connus et médiatisés. Elles ne reçoivent pas tout le mérite qui leur revient, contrairement à leurs collègues masculins. L’histoire de la physicienne canadienne Donna Strickland en est un exemple flagrant.
Mme Strickland était méconnue du grand public jusqu’à l’automne 2018 où un prix prestigieux allait changer les choses.
Un appel qui change tout
Tôt le matin du 2 octobre 2018, Donna reçoit un appel téléphonique qui changera radicalement sa vie. À l’autre bout du fil, un représentant de l’Académie royale des sciences de Suède lui annonce qu’on lui décerne le prix Nobel de physique, conjointement avec le Français Gérard Mourou et l’Américain Arthur Ashkin.
Le prix Nobel de physique a été attribué à Donna et Gérard pour avoir développé les lasers les plus intenses jamais construits. Leurs travaux ont débouché sur des outils ayant des applications en médecine, en physique et dans de nombreux autres domaines.
Donna Strickland a été seulement la troisième femme – et la première Canadienne! – à recevoir le prix Nobel de physique.
À ce moment, les responsables de l’encyclopédie Wikipédia, qui avaient refusé la création d’une page à son nom, se sont empressés d’en consacrer une sur Mme Strickland!
Douée pour les sciences
Lorsqu’elle était jeune, Donna a toujours aimé aller à l’école. Au secondaire, ses matières préférées étaient les mathématiques et la physique. L’une de ses professeurs d’histoire lui dira un jour que ce sont des matières pour les garçons. Donna fut surprise par cette remarque, car elle ne pouvait croire qu’il y avait des matières pour les garçons et d’autres pour les filles.
Sa mère avait subi les mêmes remarques lorsqu’elle était jeune. Elle voulait étudier les sciences, mais son entourage l’en a dissuadé. Elle est donc devenue professeur.
Pour ses parents, l’éducation était importante. Ils ont encouragé leurs trois enfants à poursuivre des études universitaires. Donna hésite entre le génie et la physique. Elle s’inscrit finalement en génie physique à l’Université McMaster, en Ontario. Elle y obtient son baccalauréat en 1981.
Une passion pour les lasers
C’est au cours de ses emplois d’été que Donna commence à s’intéresser aux lasers.
Ce domaine de la physique la passionne. Elle s’inscrit donc au doctorat à l’Université de Rochester aux États-Unis pour s’y spécialiser. Là-bas, elle rencontre le physicien Gérard Mourou qui dirige un laboratoire de lasers ultrarapides.
Pendant ses études de doctorat, elle rencontre Doug Dykaar, un diplômé en génie électrique qui utilise alors les lasers du groupe de Mourou. Après 5 ans à travailler ensemble dans le laboratoire, les deux scientifiques se décident à sortir ensemble.
À la fin des années 1980, Doug décroche un emploi de rêve chez Bell Labs dans le New Jersey. Après un an à travailler en Californie, Donna rejoint Doug dans le New Jersey. Elle décroche alors un poste à l’Université Princeton. Ils vont se marier en 1991 et auront deux enfants.
Un article crucial
Son premier article scientifique exposant ses travaux de doctorat sur les lasers ultrarapides est publié le 1er décembre 1985. Ce sont ces travaux qui seront primés par le prix Nobel de physique en 2018.
Au moment de la remise du prix Nobel en 2018, plus de 4000 citations sur Google pointait vers l’article scientifique de Donna Strickland. Malgré cela, Wikipédia avait refusé de créer une page sur Donna prétextant un manque de notoriété. Depuis cette controverse, l’encyclopédie a revu ses critères pour permettre de mieux reconnaître les travaux des femmes et des gens issus des minorités.
Reconnaissance tardive
L’Université de Waterloo offre à Donna un poste de professeure adjointe au département de physique et d’astronomie en 1997. Cette fois, c’est Doug qui suit Donna à Waterloo.
Donna ne sera promue professeure titulaire qu’en 2018, après avoir décroché le prix Nobel.
Depuis 2018, Donna Strickland a reçu plusieurs récompenses et reconnaissances. Ainsi, en 2019, elle a été reçue compagnon de l’Ordre du Canada. L’année suivante, elle est devenue membre de l’Académie nationale des sciences aux États-Unis ainsi que de la Royal Society de Londres au Royaume-Uni. Elle a reçu depuis ce temps de nombreux doctorats honorifiques.
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