- 1 Mars 2013 - Biodôme : Recherche scientifique
Le parc national d’Oka est l’un des plus riches du sud du Québec. Ses habitats contrastants regorgent de biodiversité, dont une grande partie demeure encore méconnue. En 2010, on y a répertorié 678 espèces végétales (Sabourin et Vermette 2010). Ce parc accueille aussi plusieurs centaines de milliers de visiteurs chaque année, ce qui exerce une forte pression sur les milieux naturels. Pour bien remplir leur mission de conservation – qui est à l’origine de la création des parcs, les gestionnaires doivent mettre en place des suivis efficaces. En 2000, la Sépaq a implanté un important Programme de suivi de l’intégrité écologique (PSIE). C’est justement dans le cadre d’un projet visant l’instauration de suivis pour cinq espèces à statut précaire que fut « découverte » notre grande inconnue!
La grande mince là-bas, vous connaissez?
L’agastache faux-népéta (Agastache nepetoides) est une plante herbacée vivace qui colonise les clairières et boisés ouverts, secs et rocheux (Comité flore québécoise de FloraQuebeca, 2009). Cette plante appartient à la famille de la menthe, les Lamiacées. Les grands individus atteignent parfois plus de deux mètres de haut. Au Québec, le Centre de données du Patrimoine écologique (CDPNQ) répertorie 3 populations actuelles et 7 historiques (>20 ans), toutes situées près de Montréal. L’espèce est actuellement « susceptible » d’être désignée menacée au Québec, à cause des pertes d’habitat; un suivi a été établi au printemps 2010 afin de documenter sa dynamique.
L’ABC d’un suivi réussi
La clé d’un suivi réussi repose sur une bonne connaissance de la phénologie – les étapes du développement saisonnier – de l’espèce. Dans le cas de cette agastache, nous avons constaté que sa visibilité augmente à l’automne. Elle demeure verte jusqu’au début octobre, alors que les végétaux qui l’entourent sont déjà fanés. Également à noter : les nouveaux semis émergent en septembre; cela veut dire que le décompte d’une colonie sera beaucoup plus précis et rapide s’il est effectué à la fin septembre. De 2010 à 2012, quatre colonies, abritant un total de 138 plants, ont été répertoriées au parc : il s’agit de la plus importante population actuellement connue au Québec. Tous les plants localisés ont été étiquetés, mesurés et cartographiés à des fins de suivi annuel.
Des interventions parfois nécessaires
Le suivi est un outil précieux qui permet de détecter des changements au sein d’une population et de son habitat. Des interventions ciblées peuvent alors être déployées afin de soutenir les populations naturelles. Ainsi, une des colonies d’agastache du parc a affiché un taux de mortalité annuel de 43 % entre 2010 et 2011. Une coupe sélective a alors été réalisée afin d’augmenter la luminosité dans le parterre forestier. Le résultat? Des semis sont rapidement apparus. Dans un autre site, la présence de nerprun bourdaine (Frangula alnus) avait été détectée. Après une coupe, une importante émergence de semis d’agastache et de nerprun (!!) a été observée. L’augmentation de lumière n’a donc pas favorisé uniquement l’espèce visée! Ce site fait maintenant l’objet d’un suivi régulier afin d’éviter l’envahissement du nerprun – une espèce problématique dans le sud du Québec.
À suivre…
Ces travaux révèlent l’importance d’intervenir activement pour favoriser les espèces à statut précaire – une contrepartie souhaitable à l’utilisation parfois intense que nous faisons de nos milieux naturels. Nos travaux se poursuivent en étroite collaboration avec les biologistes du parc. Merci au parc d’Oka : Mathieu Lemay, Véronique Vermette et au directeur, Richard Rozon. Merci également à mes collègues André Sabourin et Patrick Nantel.
Références :
- FloraQuebeca. 2009. Plantes rares du Québec méridional. Les publications du Québec. 404p;
- Sabourin, A. et V. Vermette. 2010. Flore vasculaire et principaux groupements végétaux au parc national d’Oka. Naturaliste canadien 134(2) : 8-15.
Bravo et merci, merci pour le PSIE et ainsi maintenir des
Cette belle inconnue fleurit à quel période de la saison estivale ? Peut-on, à partir des sentiers de marche du Parc Oka et sans lui nuire, l'observer au moment de sa floraison ? L'a retrouve-ton aussi au Parc (SEPAQ) St-Bruno ?Merci.
Marie Bélanger
Varennes (Québec)
Oups ! : ... maintenir des Espaces de vie ! ...
Bonjour Mme Bélanger,
Merci de l'intérêt porté à mon article. C'est en effet une espèce assez impressionnante à observer. Elle fleurit habituellement en août mais sa fleur est peu exhubérante en forêt. C'est surtout sa taille qui attire l'attention. Compte tenu de grande rareté et de sa localisation hors sentier au Parc d'Oka, je me dois de taire le lieu exacte où elle croît. On ne la retrouve pas au Parc du Mont St-Bruno; elle est connue de qq localités seulement au Qc.
Je crois qu'elle est plus abondante chez nos voisins du sud - vous pouvez regarder sur internet des infos et photos la concernant en regardant sous 'Giant hyssop'.
Je vous souhaite de bonnes découvertes!
Au plaisir,
Andrée Nault