Cette première chronique de la nouvelle année est un survol des principaux phénomènes astronomiques qui nous attendent au cours des douze prochains mois.
Éclipses, transit et occultations
Pénurie d’éclipse au Québec en 2016! Aucune des deux éclipses solaires à se produire cette année — une totale, l’autre annulaire — ne sera visible depuis l’Amérique du Nord. Trois éclipses de Lune par la pénombre, peu spectaculaires, auront également lieu au courant de l’année. Seule celle du 23 mars serait en principe visible du Québec, mais elle commence pendant que l’aube se lève et que la Lune se couche sur nos régions, ce qui la rendra imperceptible de chez nous.
On aura toutefois la chance d’assister à des éclipses d’un autre genre au courant de l’année. Ainsi, Mercure passera directement devant le Soleil pendant quelques heures le 9 mai prochain : ce phénomène rare, qu’on appelle transit, sera visible en entier depuis l’est de l’Amérique du Nord. À Montréal, la petite planète commencera à se profiler devant notre étoile à 7h13 le matin et traversera lentement le disque solaire au courant de la journée pour en ressortir complètement à 14h41. Mais attention! Comme il s’agit d’observer le Soleil, et que l’utilisation d’un télescope est essentielle, il est important de prendre toutes les précautions pour protéger sa vue : l’instrument doit être muni d’un filtre spécialement conçu pour cet usage.
Par ailleurs, la série d’occultations de l’étoile Aldébaran se poursuit en 2016 : il s’agit en quelque sorte d’« éclipses stellaires », qui se produisent lorsque la Lune vient cacher une étoile lointaine au lieu du Soleil. Notre satellite se déplace à environ un kilomètre par seconde sur son orbite autour de la Terre, et la disparition comme la réapparition des étoiles occultées se produit en un clin d’œil. Dans le cas d’une étoile brillante comme Aldébaran, dans la constellation du Taureau, le phénomène est observable à l’œil nu. Mais une paire de jumelles ou un petit télescope vous permettra de mieux voir le bord de la Lune qui s’approche de l’étoile et d’anticiper le moment où celle-ci disparaît. La première de ces occultations aura lieu le soir du 19 janvier : à Montréal, Aldébaran disparaîtra derrière la Lune gibbeuse croissante vers 21h27, pour réapparaître de l’autre côté vers 22h43. Mais comme l’heure exacte du phénomène est extrêmement sensible à la position géographique de l’observateur, il vaut mieux être prêt quelques minutes à l’avance. Trois autres occultations d’Aldébaran seront visibles du Québec d’ici la fin de l’année : en fin d’après-midi le 10 avril, très tôt dans la nuit du 19 octobre, et dans la nuit du 12 au 13 décembre.
Pluies d’étoiles filantes
Seules deux des principales pluies annuelles de météores se dérouleront dans des conditions très favorables en 2016. L’année commence en lion avec le maximum des Quadrantides, qui aura lieu tôt le 4 janvier : cette pluie est souvent la plus fortes de l’année, mais son maximum ne dure que quelques heures. À observer, bien emmitouflé, avant que la Lune décroissante, qui se lève vers 2 heures du matin, vienne affecter leur performance. Les Quadrantides tirent leur nom d’une ancienne constellation, aujourd’hui ignorée : le radiant de cette pluie est situé dans la partie nord du Bouvier, près de la frontière avec le Dragon, et s’élève au nord-est en deuxième moitié de nuit.
Les Êta Aquarides atteignent quant à elles leur maximum le 5 mai. Cette pluie d’intensité moyenne possède un pic d’activité étalé sur plusieurs jours. Son radiant, situé dans la constellation du Verseau, n’apparaît au-dessus de l’horizon qu’après 3 heures du matin; à observer en dernière partie de nuit et jusqu’à l’aube. La Lune sera nouvelle et ne gênera pas les observations. Lorsque vous apercevrez ces météores, rappelez-vous qu’il s’agit de fragments de la célèbre comète de Halley qui se désintègrent dans l’atmosphère terrestre!
Sans être exceptionnel, on s’attend aussi à un bon spectacle de la part des fameuses Perséides, dont le maximum traditionnel est attendu le matin du 12 août. Mais selon certaines modélisations informatiques, la Terre traversera le sillage de poussières disséminées par la comète 109P/Swift-Tuttle lors de son passage en 1737 : cette rencontre devrait se produire entre 20 heures et minuit le 11 août (heure de l’Est), et les observateurs européens seraient alors aux premières loges. Quoi qu’il en soit, la Lune au premier quartier le 10 août, se couchera peu après minuit dans la nuit du 11 au 12 : les conditions d’observation seront donc très bonnes en dernière partie de nuit et jusqu’à l’aube, alors que le radiant des Perséides arrive à son plus haut dans le ciel.
Du côté des planètes
Mercure est bien visible dans le ciel du soir au cours des premiers soirs de janvier : cherchez-la au crépuscule, au-dessus de l’horizon sud-ouest. Mais ce sera toutefois de courte durée : Mercure faiblit rapidement et on la perd de vue autour du 7 janvier. Deux autres excellentes fenêtres d’observation à retenir pour la planète la plus rapprochée du Soleil : dans le ciel du soir du 31 mars au 20 avril, et à l’aube du 21 septembre à la mi-octobre.
Dans l’ensemble, ce sera une mauvaise année pour l’observation de Vénus. La planète la plus brillante entreprend pourtant 2016 de belle façon : en janvier, elle domine le ciel du matin, bien visible au sud-est à l’aube. Le matin du 9 janvier, Saturne et Vénus brillent ensemble, séparées d’à peine un tiers de degré — assez rapprochées pour apparaître dans le même champ à l’oculaire d’un télescope! Mais la visibilité de Vénus se détériore rapidement à mesure qu’elle se rapproche du Soleil et de l’horizon. Après la mi-février, la hauteur de Vénus à l’aube est inférieure à 5 degrés au-dessus de l’horizon est-sud-est, 30 minutes avant le lever du Soleil. La planète est de plus en plus difficile à observer; on la perd de vue en avril dans les lueurs de l’aube. Vénus réapparaît graduellement dans le ciel du soir en juillet, mais demeure proche de l’horizon au crépuscule jusqu’en octobre. Ce n’est qu’à l’approche de la fin de l’année qu’elle commence enfin à gagner de la hauteur : en décembre, Vénus est visible à une vingtaine de degrés de hauteur au sud-sud-ouest, 30 minutes après le coucher du Soleil.
En ouverture d’année, la planète Jupiter est bien placée pour l’observation, très haut dans le ciel en milieu de nuit, sous l’astérisme principal du Lion. Jupiter est à l’opposition le 8 mars : observez à l’œil nu son déplacement par rapport aux étoiles, alors qu’elle effectue sa boucle rétrograde du 8 janvier au 9 mai. Le soir du 27 août, immédiatement après le coucher du Soleil, scrutez l’horizon en direction ouest : vous y verrez Vénus et Jupiter, séparées d’à peine 5 minutes d’arc! Cette conjonction entre les deux planètes les plus brillantes sera la plus spectaculaire de l’année, mais se déroulera très près de l’horizon. Jupiter disparaîtra d’ailleurs dans les lueurs du crépuscule au cours des jours suivants et réapparaîtra à l’aube en octobre après son passage derrière le Soleil. La planète géante sera bien visible en dernière partie de nuit pour finir l’année.
La grande vedette planétaire de 2016 sera Mars, qui passera plus près de la Terre qu’à tout autre moment au cours des dix dernières années. Malheureusement, pendant les quelques semaines entourant son opposition du 22 mai, la planète rouge se trouve dans une portion du ciel qui s’élève peu au-dessus de l’horizon pour les observateurs de l’hémisphère Nord, ce qui dégrade les conditions d’observation au télescope. À l’œil nu, la planète rouge est encore relativement faible en début d’année : on la retrouve après 3 heures du matin en direction est-sud-est, non loin de l’étoile Spica. Mais son éclat augmente rapidement au cours de l’hiver et du printemps : entre le 30 avril et le 28 juin, la planète rouge dépasse même Sirius, l’étoile la plus brillante! Portez attention au mouvement de Mars parmi les constellations : à compter du 17 avril, la planète est en mouvement rétrograde vers l’ouest avant de repartir vers l’est le 29 juin. Au final, elle décrira ce printemps et cet été un grand « S » devant les étoiles du Serpentaire, du Scorpion et de la Balance.
Saturne sera à l’opposition le 3 juin. La planète aux anneaux se trouve dans le Serpentaire, quelques degrés au nord d’Antarès et de la tête du Scorpion, où elle effectue sa boucle rétrograde du 25 mars au 13 août. C’est la même région du ciel où se trouve Mars, et comme la planète rouge, Saturne s’élève peu dans le ciel du Québec, ce qui nuit à la qualité des observations au télescope. Mais ses anneaux nous apparaissent bien ouverts, inclinés d’environ 26 degrés. Jusqu’à la mi-avril Saturne n’est visible qu’en seconde moitié de nuit, mais sera observable en soirée tout l’été jusqu’en novembre.
Bonne année 2016, et bonnes observations !