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Forêt feuillue

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L'érable à sucre (Acer saccharum) est vraiment prestigieux
Crédit photo : Bruce Marlin
Acer saccharum
  • Acer saccharum
  • Juglans nigra
  • Asarum caudatum
  • Zea mays
  • Helianthus annuus
  • Pinus strobus
  • Phaseolus vulgaris

Les Gardiens de la forêt feuillue

Cinq nations habitent la forêt feuillue depuis des temps immémoriaux : les Abénaquis, les Malécites, les Micmacs, les Hurons-Wendats et les Mohawks. Leur propre nom – Wôbanaki, « Terre de l'Aurore »; Wulustuk, « rivière Saint-Jean »; Mi'gmaq; « Les Alliés » sans doute; Wendat, « Ceux de l'île »; et Kanien'kehá:ka, « Peuple du Silex » – évoque autant de liens à la terre que d'origines diverses.

Les Abénaquis, les Wolastoqiyik (Malécites) et les Mi'gmaq font partie de la grande famille linguistique algonquienne. De leur côté, les Hurons-Wendats et les Mohawks font partie de la famille linguistique iroquoienne. Ces nations partagent un écosystème où prédominent l'érable à sucre, le frêne et l'orme, mais où se trouvent également des conifères comme le pin et la pruche.

L'érable à sucre

Grand arbre caractéristique des forêts feuillues du sud du Québec, l'érable à sucre (Acer saccharum) est vraiment prestigieux. L'automne, il donne aux forêts une flambée de couleurs et, au printemps, il fournit une sève dont tout le monde raffole.

Le frêne

Coupé, encoché, battu, machiné, roulé, le frêne noir (Fraxinus nigra) fournit des languettes de bois minces et souples que les Abénaquis tressent avec du foin d'odeur pour façonner des paniers similaires à ceux des Hurons-Wendats et des Mi'gmaq. Facile à cintrer, le frêne blanc sert à fabriquer les raquettes chez les Abénaquis et les Wolastoqiyik, et les manches d'outils chez les Mi'gmaq.

Cueillette et collecte

La terre offre au cueilleur une multitude de plantes comestibles, aromatiques, médicinales et colorantes. Année après année, chaque nation y cueille et récolte une centaine d'espèces contribuant au bien-être général de ses membres. Dans le calendrier, les plantes de cueillette tiennent une place de choix. L'érable et le fraisier se voyaient consacrés chacun une cérémonie d'action de grâces chez les Mohawks. Au moins six noms consécutifs de mois réfèrent aussi à la croissance végétale : d'avril à septembre, onerahtokha, « petite feuille »; oneratakowa, « grande feuille »; oiariha, « fruit peu mûr »; oiarikowa, « fruit bien mûr »; seskeha, « les broussailles »; et sehske'ko:wa', « grandes broussailles ».

Traditionnellement, la cueillette revient surtout aux femmes. Chez les Abénaquis, l'eau d'érable, les frondes de fougères et l'ail des bois sont récoltés au printemps, les fraises des champs, les framboises, les mûres, les groseilles et les bleuets sont récoltés à l'été, le pimbina à l'automne et, selon les saisons, les plantes médicinales.

L'automne était le temps de la collecte des glands et des noix; les fruits de la cueillette étaient ensuite consommés frais ou conservés pour servir d'aromates dans des préparations comme la bouillie de maïs (ou sagamité) des Hurons-Wendats.

Les baies

Fruits à chair pulpeuse, les fraises, les framboises, les mûres, les groseilles et les bleuets ont de tout temps contribué à l'alimentation autochtone. Les baies jouent un rôle central dans l’alimentation quotidienne et dans l’apport de vitamines. Elles sont consommées autant fraîches que conservées longtemps grâce à différentes techniques:

  • le séchage;
  • la purée;
  • la poudre séchée;
  • le pemmican, un mélange de viande et de baies séchées réduites en poudre et mélangées à de la graisse animale.

La cueillette et la collecte de baies sont des activités au cœur des cultures autochtones car elles invitent à la patience et à l’observation. Ce sont des activités pratiquées en famille et en groupe. C’est un moment privilégié pour être ensemble sur le territoire.

Les noix

Glands de chêne, noix de caryer et de noyer, noisettes du noisetier, tous ces fruits font partie de l'histoire des populations autochtones depuis plus de 7 000 ans. Les enclumes de pierre utilisées pour les casser se trouvent encore aujourd'hui dans les sites archéologiques. La présence d'écales de noix du noyer cendré à l'île Verte, à 100 km au nord de son aire de distribution, est un témoin vivant de sa vaste circulation dès l'an 1 200.

Traditionnellement, ce sont surtout les femmes et les enfants qui cueillaient et préparaient ces fruits. Les Hurons-Wendats faisaient bouillir plusieurs fois les glands dans la cendre pour en éliminer l'amertume. Les Mohawks utilisaient les noix dans la fabrication de galettes ou de la bouillie de maïs et les Iroquoiens extrayaient également une huile de noix utilisée pour assaisonner citrouilles, courges et autres ou, encore, comme fixatif capillaire.

Le maïs

Selon une légende iroquoienne, ce serait de la sépulture d'une femme que serait apparu le maïs, surgissant de ses seins. Le maïs est souvent représenté par une femme dans la mythologie des Mohawks et des Hurons-Wendats et traditionnellement cultivé par les femmes.

Aussitôt les surfaces défrichées par les hommes, les femmes travaillaient le sol, armées de petites houes. Elles plantaient ensuite le maïs dans des buttes, suivi généralement de ses « sœurs », les haricots et les courges. Les champs pouvaient compter des milliers de buttes, le maïs constituant jusqu'à 65 % de l'alimentation des Iroquoiens.

La première récolte de maïs vert avait lieu en août chez les Mohawks et, comme les semailles et la moisson d'automne, elle donnait lieu à de nombreuses fêtes et cérémonies. L'épuisement des sols et des ressources en bois de chauffage obligeait toutefois à la relocalisation périodique des villages, environ tous les 15 ans.

Surnommé blé d'Inde par les Européens, le maïs est originaire d'Amérique. Les Autochtones ont développé d'innombrables variétés, dont cinq au moins cultivées par les Mohawks : une de maïs dur, deux de maïs à farine, une de maïs sucré et une de maïs soufflé. Le maïs était le produit d'échange par excellence pour obtenir les fourrures du Nord.

Les trois sœurs : maïs, haricots et courges

La légende raconte que le maïs, les haricots et les courges avaient l'apparence de trois belles femmes, très affectueuses, et qui adoraient être ensemble. La coutume veut qu'elles soient appelées les Trois soeurs, ou De-o-ha'-ko, qui signifie « Notre vie », « Notre soutien » en langue iroquoienne. Ces trois plantes constituaient l'alimentation de base des anciennes sociétés huronne-wendate et mohawk.

Plantées, récoltées, consommées ensemble, elles faisaient aussi l'objet de cérémonies communes d'action de grâces : bénies lors des plantations de printemps, évoquées en priant le Tonnerre de bien les arroser durant l'été et célébrées à l'automne au moment de la récolte. Un chant de femmes évoque ce jour de retrouvailles : « Les Trois soeurs sont heureuses maintenant, car elles sont de nouveau chez elles après avoir passé l'été aux champs. »

La culture intercalaire des Trois soeurs qui se pratique encore aujourd'hui procure plus d'un avantage agricole. Les grandes feuilles du maïs protègent les courges du vent et du soleil et celles des courges empêchent les mauvaises herbes de pousser tout en gardant l'humidité. Fixant l'azote dans le sol, les haricots s'enroulent autour des tiges du maïs pour se hisser vers la lumière.

Le tabac

Plantes de lumière et de l'esprit, le tabac et le tournesol étaient cultivés par les Iroquoiens. Le tabac était utilisé lors des cérémonies religieuses, aux séances de guérison ou lors de festins. Il est encore semé à Kahnawake, près de Montréal, et il est toujours utilisé dans les cérémonies.

Quant au tournesol, plante de lumière, il était cultivé pour ses graines dont on tirait une huile servant d'assaisonnement ou de lotion capillaire. Ses fleurs solaires sont probablement aussi à l'origine de motifs décoratifs dans l'art iroquoien.

Le pin blanc: symbole de paix

Pouvant atteindre au-delà de 35 mètres de haut, le pin blanc est l'un des plus grands arbres de l'Est du Canada. Prospérant rapidement en pleine lumière, sa taille et son port particulier le rendent bien visible en forêt. Nul doute qu'il sert toujours de repère dans la forêt aux Algonquins. Nul doute qu'il ait connu et connaît toujours une pléiade d'utilisations : tronc évidé en pirogue chez les anciens Iroquoiens, palissades de troncs dans les villages hurons-wendats, remède pour toutes les Premières Nations.

Arbre de vie, Arbre de paix, Arbre céleste, le pin fut l'une des images fortes employées par le grand chef Kondiaronk alors qu'une année avant la signature de la Grande Paix de Montréal de 1701, il évoquait ainsi la paix future devant les nations réunies : Le soleil a aujourd'hui dissipé tous les nuages pour faire paraître ce bel arbre de paix.

L'art des maisons-longues

Pouvant loger chacune de 5 à 6 familles d'environ 5 individus, ces habitations construites par les hommes se nomment Karonta'seronnion en mohawk et ganonchia en huron-wendat. Leur structure en forme de tonnelle est faite de pièces de bois disposées verticalement et horizontalement et recouvertes de longues dalles d'écorce, préférablement d'orme ou de cèdre. À l'intérieur, au centre, des foyers chauffent la maison et sont partagés par deux familles se faisant face. Un porche, parfois deux, ferme l'extrémité et sert à entreposer maïs et bois de chauffage.

Ces maisons-longues, adaptées à la culture du maïs, ont perduré pendant près d'un millénaire, jusqu'au 18e siècle au moins. Elles font encore partie de l'identité des Mohawks et des Hurons-Wendats. Des habitations longues, de dimensions plus modestes, sont encore utilisées par certaines nations algonquiennes nordiques, notamment le kichiihchauukimikw rectangulaire des Cris, qui peut accommoder de 2 à 3 familles durant l'hiver, et le shaputuan des Innus.