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Pourquoi se rapproche-t-on de la galaxie d’Andromède alors que l’Univers est en expansion?

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Galaxie d'Andromède
Photo : Shutterstock
Galaxie d'Andromède
  • Galaxie d'Andromède
  • Simulation de notre galaxie entrant en collision avec celle d'Andromède.

Pourquoi risque-t-on de croiser la galaxie d’Andromède dans un milliard d'années si l’Univers est en expansion? À priori, il semble y avoir un paradoxe dans cette question. Olivier Hernandez, directeur du Planétarium, assure qu’aucune loi universelle de la physique ni de l’astrophysique n’est transgressée. Pour mieux comprendre, il remonte d’abord dans le passé. Il explique ensuite les phénomènes en jeu, soit l’expansion de l’Univers et la dynamique locale des galaxies.

Ce texte est une adaptation d’une chronique diffusée à l’émission Moteur de recherche, sur les ondes d’ICI Radio-Canada Première.

L’expansion de l’Univers : la petite histoire d’une grande découverte

Le grand débat

On sait que l’Univers en est en expansion depuis une centaine d’années. Tout est parti d’un grand débat enflammé lors duquel se sont affrontés deux courants de pensée sur la nature des nébuleuses spirales visibles. Celles-ci étaient-elles des objets appartenant à notre galaxie, la Voie lactée, et notre galaxie contenait-elle tout l’Univers (théorie défendue par Harlow Shapley)? Ou ces nébuleuses représentaient-elles d’autres galaxies plus lointaines que les limites de notre propre Galaxie, repoussant alors les dimensions de notre Univers (théorie défendue par Heber Doust Curtis)? Ce grand débat de l’Académie des sciences de Washington s’est conclu par un match nul.

La mesure des distances

C’est en 1923, grâce à une femme et à un homme, que la balance a penché du côté de Curtis. L’homme, tout le monde le connaît, c’est le fameux Edwin Hubble. La femme, on la connaît moins bien, c’est Henrietta Swan Leavitt. Madame Leavitt a réussi à résoudre un problème récurrent auquel se frappaient les astrophysicien.ne.s : la mesure des distances. Grâce à ses observations d’étoiles géantes dont la luminosité varie avec une période définie, elle a été en mesure de calculer les distances de bons nombres d’objets dans le ciel.

Hubble, grâce aux travaux d’Henrietta Swan Leavitt, a donc « agrandi » notre Univers?

C’est en utilisant les travaux de Leavitt que Hubble est parvenu à mesurer les distances des fameuses nébuleuses spirales. Bien que ses mesures de distances étaient erronées, c’était tout un exploit considérant les outils de l’époque! Il a démontré que la nébuleuse d’Andromède est en fait une autre galaxie située bien au-delà de la nôtre.

Hubble, grâce à Lewitt, tranche donc le débat, et l’Univers prend une nouvelle dimension dans l’esprit humain : l’Univers ne se limite plus à notre Galaxie, mais il est beaucoup plus grand. La nébuleuse spirale d’Andromède devient alors la grande galaxie spirale d’Andromède.

Le scientifique ne s’est pas arrêté là. En 1929, en s’appuyant sur les travaux des astronomes Vesto Slipher et Georges Lemaître, il a redécouvert le fameux décalage vers le rouge des galaxies (découvert par Lemaître). Ce phénomène traduit l’expansion de l’Univers par une augmentation des longueurs d’onde pour des objets de plus en plus lointains. L’interprétation de l’expansion de l’Univers sera donnée plus tard avec le concept du Big Bang.

L’Univers est en expansion, mais quelle est la dynamique dans une galaxie près de chez nous?

Si l’on observe notre environnement local proche, on remarque que la Terre tourne autour du Soleil, que le Soleil tourne autour du centre de notre Galaxie, et que notre Voie lactée semble quant à elle se rapprocher des galaxies du groupe local dont elle fait partie, composé d’une quarantaine de galaxies. Ainsi, tous les objets ne semblent pas s’éloigner les uns des autres. En fait, la gravitation joue parfaitement son rôle dans la gestion des mouvements.

D’ailleurs, les deux plus grosses galaxies de cet amas, la galaxie d’Andromède et la nôtre, s’attirent mutuellement. Grâce à des données récoltées par le télescope Hubble en 2012 et analysées par l’équipe de Roeland P. van der Marel, les scientifiques ont pu modéliser la dynamique des deux galaxies et conclure à leur prochaine collision dans…. 4 milliards d’années!

Deux phénomènes superposés

Prenons l’analogie d’un pain aux raisins, peut-être un peu bancale, mais fortement utile pour comprendre. On mange nos émotions en temps de COVID-19 et les astronomes aussi! La pâte (l’Univers) gonfle et les raisins (galaxies) s’éloignent les uns des autres à mesure que le pain grossit. Ça, c’est l’expansion de l’Univers. Mais rien n’empêche quelques raisins (galaxies) d’avoir des interactions gravitationnelles et leurs propres mouvements.

En conclusion, il y a bel et bien deux phénomènes superposés. D’abord, la gravitation de notre groupe local de galaxies, qui fait en sorte que chacune des galaxies proches s’attire mutuellement. Et l’expansion de l’Univers, qui fait que tout l’Univers est en expansion à grande échelle dans toutes les directions. Andromède et la Voie lactée vont donc continuer à s’attirer mutuellement, dans leur amas local, qui lui aussi a une trajectoire bien définie dans un amas plus grand (l’amas de la Vierge), lui-même faisant partie d’un ensemble d’amas et de superamas ayant leur propre dynamique.