- 10 Juillet 2019 - Biodôme : Portrait d'animal
Clin d’œil à Picasso
Nés tout plat? Eh bien non! Cette bizarre apparence qu’ont les poissons plats reposant sur les fonds marins n’est pas de naissance. Par exemple, la larve du flétan ressemble à celles des autres poissons, qualifiés en science de «pélagiques symétriques», c’est-à-dire qu’elle nage librement dans la colonne d’eau, le ventre face au fond et elle possède un œil de chaque côté de la tête. C’est au stade de juvénile, lorsque le jeune flétan atteint environ 10 cm de longueur, qu’une remarquable métamorphose s’opère. Il adopte la nage de côté et un mode de vie benthique (sur le fond), accompagné d’une lente migration de l’œil gauche vers l’œil droit. Cette transformation sera complétée à l’âge adulte: les deux yeux se retrouveront du même côté de la tête du poisson, soit du côté droit. Dit «oculaire», ce côté est pigmenté et correspond au dessus du corps du flétan. Expert en camouflage grâce à cette coloration, il évite ainsi les prédateurs et prend ses proies par surprise. L’autre flanc, le gauche (côté «aveugle» sur lequel il repose), n’est pas pigmenté. Plusieurs espèces de poissons plats sont présentes dans les eaux du Saint-Laurent et le côté oculaire peut varier selon la famille. Si on ajoute à cela une bouche s’ouvrant horizontalement et des yeux exorbités et indépendants, ces poissons d’exception ne sont peut-être pas si étrangers à l’art surréaliste de Picasso !
Les espèces de ce groupe qui seront présentées à la réouverture du Biodôme
Le flétan atlantique (Hippoglossus hippoglossus), est le plus grand poisson plat du monde, pouvant atteindre plus de deux mètres et 300 kg. Un deuxième représentant de la même famille, la plie rouge (Pseudopleuronectes americanus), fait moins de 50 cm et pèse un peu plus de 1 kg.
Fin au casse-tête de l’évolution des poissons plats
Une étude publiée en 2012, réalisée sur des fossiles datant de l’Éocène (plus de 45 millions d’années) par le paléobiologiste Matt Friedman de l’Université d’Oxford, a mis à jour l’évolution progressive des poissons plats. Grâce à la description détaillée de l’espèce éteinte, appelée Heteronectes, signifiant «nageur différent», le chercheur a découvert que chez les premiers membres de ce groupe, l’œil «migrateur» du poisson adulte n’était pas encore passé du côté opposé du crâne. Ce fossile, avec la forme aplatie caractéristique, présente une asymétrie crânienne frappante : l’orbite gauche est déplacée vers le haut du crâne, mais n’atteint pas la ligne médiane dorsale. Cette découverte fantastique montre donc le stade intermédiaire parfait entre les poissons symétriques et les poissons plats. De quoi nourrir l’humain dans sa quête de sens, qui ne peut que s’émerveiller !