- 25 Mars 2020 - Jardin botanique : Coulisses du Jardin, Coups de cœur
La phytoprotection… Mais qu’est-ce donc? Ce terme, couramment utilisé en agriculture et en horticulture au Québec, n’est apparemment pas un « vrai mot » de la langue française. Il s’agit pourtant bel et bien de mon métier : je suis horticultrice spécialisée responsable de la phytoprotection dans les serres du Jardin botanique de Montréal. Vous aimeriez connaître davantage l’envers du décor?
Phytoprotection, vous dites?
La phytoprotection regroupe l’ensemble des actions réalisées afin d’assurer la santé des végétaux en les protégeant des potentiels bioagresseurs. C’est un peu comme être leur ange gardien. Cela implique d’ouvrir l’œil afin de détecter la présence d’insectes, de champignons, de bactéries ou de virus. Dans les serres, rien ne se perd, rien ne se crée, tout circule, tout change simplement de lieu! Un indésirable peut être transporté au fil des déplacements d’un charriot, suivant par exemple sa plante hôte d’une serre de propagation jusqu’au site de production. Il peut être déplacé involontairement sur les vêtements, des outils ou sur du matériel vivant pendant toute tâche d’entretien ou d’arrosage… Au fil du temps, des populations de cochenilles farineuses et de tétranyques à deux points, pour ne nommer que celles-là, ont maintes fois fait le tour du Jardin. Les petits intrus des écosystèmes, provenant de l’extérieur ou de l’intérieur des serres, profitent de toute situation pour s’accrocher sur les végétaux ou dans leur environnement immédiat. Certains voyagent même via de simples courants d’air. Ils s’installeront, parfois pour de bon, dans les moindres interstices des végétaux. Tout un défi, n’est-ce pas ? Cette réalité méconnue existe depuis fort longtemps… considérant que certains végétaux présentés aujourd’hui font partie des collections du Jardin botanique de Montréal depuis la première moitié du 20e siècle.
À la rescousse des végétaux!
Mon rôle d’horticultrice? Que les conditions de culture soient idéales pour les plantes des collections, mais pas pour les organismes qui souhaitent y vivre à leurs dépens. Je suis une guerrière qui protège ces précieux spécimens, desquels nous n’avons souvent que deux ou trois exemplaires. Certaines de ces plantes n’existent plus à l’état naturel! Les moyens déployés sont variés et les actions se doivent d’être cohérentes et organisées. Puisqu’il s’agit d’un milieu relativement clos, les aléas de la météo ou les prédateurs naturels ne peuvent pas nous aider contre les envahisseurs. Mais on peut tenter de reproduire le milieu naturel. Par exemple, à plusieurs endroits, nous avons recours à des jets d’eau. Vous avez bien lu : de simples jets d’eau! Il n’y a rien de mieux pour déloger mécaniquement la coriace cochenille farineuse. À condition d’être minutieux, rigoureux et de ne pas sur arroser les végétaux. Ça vous surprend?
Il n’existe pas que les produits phytosanitaires comme option. Il s’avère même judicieux de s’impliquer dans la saine gestion du stress des végétaux! D’ailleurs, dans un souci de respect et d’équilibre, autant pour la santé humaine que pour l’environnement, de nouvelles alternatives complémentaires et plus durables, sont maintenant disponibles : biostimulants, biopesticides, insectes prédateurs et parasitoïdes… Des mycorhizes dans le sol à la vie bactérienne sur le feuillage, les végétaux ont encore bien des secrets à dévoiler sur leur symbiose avec leur environnement. Comme quoi, au final, même dans des milieux artificiels, les végétaux n’auront peut-être plus tant besoin de nous pour assurer leur protection, quand on saura leur recréer un milieu douillet et plus vivant.
Pour en savoir plus sur la phytoprotection au Jardin botanique de Montréal :