- 29 Octobre 2019 - Espace pour la vie
Je presse le pas dans les sentiers humides du Jardin botanique de Montréal, comme si je voulais devancer les feuilles qui tourbillonnent leur chemin depuis les branches éventées jusqu'au gravier gris ciel. C'est peine perdue, et j'ai l'impression d'enfreindre une règle non écrite. Il y a des panneaux invisibles sur lesquels je lis: «Interdit de s'empresser. Ici, seuls les enfants ont un droit de course.» De toute façon, je ne rattraperai pas l'été. Les derniers pétales se laissent mollement bombarder par la pluie froide.
Je me dois d'être claire, cet endroit est toujours magnifique, même sous la neige. Mais je suis ici pour assouvir ma passion: photographier des insectes en gros plan. Il ne reste que des bourdons engourdis par le froid. Ah oui, et une pauvre coccinelle immobile, probablement morte, peut-être “zombifiée” par une guêpe parasitoïde du même type que celle décrite il y a quelques années par les étudiants de l'entomologiste Jacques Brodeur, lui-même basé au Jardin botanique.
Chercher des bibittes
Parce que le Jardin botanique et les musées d'Espace pour la vie ne sont pas qu'un lieu de ravissement pour les naturalistes dans l'âme. Il s'y fait aussi de la recherche, de la vraie, menée par des scientifiques en chair en os, mais pas toujours en sarrau. J'aurai assurément plus de chance avec ces bibittes-là !
Quand elles ne sont plus sur le terrain durant l'été, on peut les retrouver dans certaines cachettes de leur environnement naturel: l'Insectarium, le Biodôme*. On dit qu'il y en a aussi quelques-unes qui ont investi le Planétarium Rio Tinto Alcan ! Ou encore l'Institut de recherche en biologie végétale (IRBV), dont fait partie le Centre sur la biodiversité. Cette institution est l’héritière d'une collaboration entre l'Université de Montréal et le Jardin botanique amorcée en 1931 par le frère Marie-Victorin.
“Je voudrais savoir pourquoi toutes ces choses sont belles”
C'était la devise de l'école pour enfants fondée au Jardin botanique par Marcelle Gauvreau, amie très proche et confidente du frère Marie-Victorin. Cet esprit de découverte, cette volonté de transmission du savoir à un large public, il flotte toujours à Espace pour la vie. C'est Michel Labrecque qui me l'a dit. Pas M. Stade Olympique, mais bien le conservateur du Jardin botanique, qui est aussi chercheur à l'IRBV.
J'ai eu la chance de lui poser des questions sur son travail, son passé, sur ce qui a façonné son regard de scientifique. J'ai aussi eu un accès privilégié à l'entomologiste Maxime Larrivée, Directeur de l’Insectarium, qui me confiait avoir eu un choix déchirant à faire, entre une carrière de sportif professionnel ou la science. Il a choisi les papillons.
L'océanographe Nathalie Rose Le François, chercheuse au Biodôme, m'a démontré hors de tout doute que l'originalité et l'opportunisme sont de grandes qualités, des avantages évolutifs pour les chercheuses. Olivier Hernandez, directeur du Planétarium Rio Tinto Alcan, me racontait qu'il était parti de la France pour emménager au Québec dans l'espoir de se rapprocher d'Hubert Reeves. Comme M. Reeves passe beaucoup de temps dans l'Hexagone, leurs regards se croisent quand ils lèvent les yeux au ciel !
La nuit, tous les « coups » sont permis !
Je blague en les appelant affectueusement mes bibittes, mais j'hésite à perpétuer ce mythe des chercheur.euses d’ovnis, qui sortent de la norme. Vais-je vous décevoir en affirmant que les scientifiques sont des êtres humains comme tous les autres, avec leurs manies, leurs tics qui agacent leurs proches et tout ce qui les rend banalement extraordinaires ? Je vous invite à le constater par vous-même, le 15 novembre prochain, à la première édition de la Nuit des chercheur.euse.s. Dès 19h, on ouvre les portes du Planétarium pour vous faire vivre 1001 rencontres avec des scientifiques qui vous livreront leurs histoires avec humour et émotion, dans une ambiance de fête. Apportez votre curiosité !
*L’Insectarium et le Biodôme sont fermés pour travaux. Réouverture prévue au printemps 2020 pour le Biodôme et à l’été 2021 pour l’Insectarium.
Rendez-vous le 15 novembre dès 19h !
Une occasion unique et inusitée de côtoyer les protagonistes de la recherche qui vous révèleront l’univers dans lequel il.elle.s évoluent au quotidien!