L’alliaire officinale (Alliaria petiolata) est une espèce envahissante d’origine européenne.
Elle a été introduite en Amérique du Nord au 19e siècle par les colons qui l’employaient comme plante médicinale et condimentaire.
Elle a aujourd’hui envahi plusieurs milieux naturels au Québec, en Ontario, dans les Maritimes et en Colombie-Britannique. C’est une espèce exotique agressive qui constitue une menace importante pour la biodiversité de nos forêts. Elle peut dominer rapidement le parterre forestier, au détriment de la flore indigène. Son expansion au Québec est rapide, mais malheureusement elle passe souvent inaperçue, car elle est discrète et méconnue.
Apprenez à la reconnaître – elle est facile à identifier – et participez aux efforts pour contrer son invasion.
Identifier l’alliaire officinale
L’alliaire officinale est une plante herbacée bisannuelle de la famille du chou (Brassicacées).
Elle se reproduit par graines.
La première année, l’alliaire germe et produit une rosette de feuilles basales en forme de rein et dentées. Ces feuilles sont persistantes (elles restent vertes l’hiver).
Au cours de la deuxième année, l’alliaire développe une ou plusieurs tiges de 30 cm à plus de 1,5 m de hauteur. Des feuilles triangulaires bordées de grosses dents sont disposées en alternance de part et d’autre de la tige.
De mai à début juin, de petites fleurs blanches à quatre pétales font leur apparition.
Elles sont suivies de la formation de fruits longs et étroits nommés siliques. Chaque silique renferme une vingtaine de petites graines noires. Les siliques s’ouvrent et dispersent leurs graines en juillet et en août.
Les jeunes feuilles de l’alliaire sentent fortement l’ail lorsqu’on les écrase.
La plante est d’ailleurs aussi connue sous le nom d’herbe à l’ail.
Une espèce très compétitive
L’alliaire officinale possède plusieurs avantages compétitifs qui contribuent au succès de son envahissement :
- Adaptabilité : elle peut s’établir tant en milieux humides (bois humides, fossés) que secs (bords des routes ou des sentiers), et elle peut pousser autant au soleil (champs) qu’en zone ombragée. Sa tolérance à l’ombre la rend très compétitive en forêt.
- Croissance hâtive : sa rosette de feuilles persistantes lui permet de profiter des premiers rayons du soleil au printemps et ainsi d’amorcer sa croissance hâtivement, ce qui lui confère un avantage important.
- Abondante production de graines : elle produit 200 à 1 000 semences par plant. Une colonie peut produire jusqu’à 100 000 graines par mètre carré!
La majorité des graines d’alliaire germent après un an, mais elles peuvent demeurer viables jusqu’à 15 ans, formant une banque de graines dans le sol. Les graines sont facilement dispersées par les humains et les animaux. - Libération de toxines dans le sol : les racines de l’alliaire produisent des glucosinolates. Ces toxines nuisent aux champignons mycorhiziens du sol, ce qui affecte les végétaux poussant à proximité. La végétation indigène se raréfie alors, ce qui permet à l’alliaire de s’étendre davantage.
- Faible prédation par les herbivores : cette espèce exotique envahissante est peu ou pas broutée par les herbivores tels que les cerfs de Virginie. Ces derniers lui préfèrent la végétation indigène qui devient encore plus éparse.
Impacts de l’alliaire sur la biodiversité
L’alliaire officinale forme rapidement des peuplements denses et peut dominer les sous-bois en seulement 5 à 7 ans. La taille des colonies peut doubler tous les 4 ans!
Flore
Lorsqu’elle envahit une forêt, l’alliaire peut supplanter les plantes indigènes et menacer plusieurs espèces qui ont déjà un statut précaire, comme le ginseng à cinq folioles (Panax quinquefolius), une plante menacée au Québec.
Faune
En ayant des répercussions sur la flore, l’alliaire peut affecter la faune indigène. C’est le cas avec la piéride de Virginie (Pieris virginiensis), un petit papillon blanc considéré rare et dont la répartition canadienne se limite aux érablières à caryers du sud du Québec et de l’Ontario.
Les chenilles de cette piéride se nourrissent exclusivement du feuillage des dentaires, entre autres de la dentaire à deux feuilles (Cardamine diphylla), une espèce vulnérable au Québec.
Or l’envahissement des forêts par l’alliaire réduit les populations de dentaires, diminuant ainsi la source de nourriture des larves. Par ailleurs, les papillons de la piéride de Virginie confondent parfois l’alliaire avec la dentaire et y pondent leurs œufs. Comme les chenilles ne se développent pas sur les feuilles de l’alliaire, elles finissent par mourir.
Comment lutter contre l’alliaire
Combattre l’alliaire demande des efforts soutenus, mais chacun peut contribuer à lutter contre cette espèce exotique envahissante. Plus les interventions sont précoces, plus elles ont de chances d’être couronnées de succès.
Voici comment vous pouvez passer à l’action :
1. Apprenez à reconnaître l’alliaire officinale. Gardez l’œil ouvert pendant vos randonnées. La plante est souvent présente dans les fossés, le long des routes et des sentiers.
2. Restez sur les sentiers lors de vos promenades en forêt, et gardez vos animaux de compagnie en laisse.
3. Si vous observez la plante, signalez sa présence aux responsables du parc ou à votre municipalité. Vous pouvez également enregistrer votre observation à l’aide de l’outil de détection Sentinelle du ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC). Cet outil permet de cartographier les observations d’espèces exotiques envahissantes.
4. Participez à une corvée d’arrachage près de chez vous. Informez-vous auprès de votre municipalité ou consultez notre blogue.
5. Si la plante pousse sur votre terrain, arrachez-la en prenant les précautions suivantes.
- Arrachez les plants d'alliaire avant qu’ils ne produisent des graines, sinon il y a un grand risque de disperser les semences.
- Il est plus facile de procéder à l’arrachage lorsque le sol est humide, après une pluie.
- Arrachez les plants en entier. Il est important de tenir le plant à la base puis de tirer pour enlever la racine qui a l’apparence d’une petite carotte.
- Placez les plants déracinés dans des sacs à poubelle noirs et entreposez ces derniers au soleil pendant quelques semaines afin de tuer l’alliaire. Après cette période, il est possible de disposer des sacs lors de la collecte des ordures.
- Ne mettez jamais les plants d’alliaire au compost!
6. Partagez ces informations avec votre entourage.